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Livre sur la flore

Livre de K. Rebbas :  
 
Développement durable et Conservation de la Biodiversité  
Parc National de Gouraya et des sites d'intérêt Biologique et Écologique du golfe de  
Béjaïa (Algérie)
 
 
Auteur : Khellaf Rebbas  
Edition : Presses Académiques Francophones (14-07-2014)  
ISBN-13: 978-3-8381-4381-1  
Site : https://www.morebooks.de/  
http://www.amazon.fr/ 
 
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LA PLUS GRANDE ORCHIDEE DU MONDE A FLEURI AU BRESIL.  
Mis en ligne mercredi 2 février 2011 par  
TELA BOTANICA ASSOCIATION
.  
 
L’institut brésilien de l’Environnement (Ibama) a annoncé mardi que la "plus grande orchidée du monde", haute de 2,5 mètres et dont certaines tiges mesurent trois mètres de long, avait fleuri dans un parc botanique de Brasilia. 
"La Grammatophyllum speciosum, orchidée originaire de Malaisie, a fleuri dans le parc aux orchidées nationale d’Ibama et détient le titre de plus grande orchidée au monde", précise l’Ibama dans un communiqué. L’orchidée a été plantée il y a cinq ans. Elle possède 19 tiges pouvant atteindre jusqu’à trois mètres de long, sur lesquelles ont poussé 400 fleurs. 
La plante "s’est adaptée aux rigueurs climatiques" de la capitale brésilienne, bien plus sèche que la Malaisie, a précisé le biologiste Lou Menezes, directeur du parc. 
Des experts travaillent désormais sur une nouvelle espèce hybride, fruit d’un croisement entre la Grammatophyllum et la Cyrtopodium brandonianum, espèce endémique de la forêt tropicale brésilienne. 
 
GRAMMATOPHYLLUM SPECIOSUM (IBAMA-MMA.Brasil)
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ORCHIDACEAE 
 
La famille des Orchidaceae (Orchidacées ou Orchidées) est une très grande famille de plantes monocotylédones. C'est la famille végétale la plus diversifiée, comptant plus de vingt-cinq mille espèces, réparties en huit-cent-cinquante genres. 
 
Ce sont des plantes herbacées, de type divers, autotrophes ou mycotrophes, à feuilles réduites, à écailles, ou développées, terrestres ou épiphytes, pérennes, rhizomateuses ou tubéreuses, des régions tempérées à tropicales. La symbiose, qu'elle soit de type autotrophique, saprophytique voire parasitique, se fait avec un champignon microscopique qui permet à la plante de pallier à la fois l'absence de toute réserve dans ses graines, et l'absence de radicelles au niveau de ses racines. C'est une famille largement répandue et on rencontre la majorité des espèces dans les régions tropicales. La classification phylogénétique situe aujourd'hui cette famille dans l'ordre des Asparagales. 
Le mot Orchidée vient du grec orchis, qui signifie testicule, en référence à la forme des tubercules souterrains de certaines orchidées terrestres des régions tempérées : Seuls les deux tubercules ressemblent un peu à cette partie du corps. C'est à Théophraste que l'on attribue cette dénomination. Selon les données scientifiques obtenues grâce au pollen d'une orchidée éteinte retrouvé dans de l'ambre, cette famille serait âgée de 75 à 86 millions d'années. Les orchidées font partie des monocotylédones, et la famille la plus apparentée est celle des liliacées. Les orchidées ont notamment développé des caractéristiques rendant cette famille de plantes très économe en ressources : réduction du nombre d'étamines, symbiose avec un champignon, métabolisme de type CAM, etc... Leurs graines sont souvent minuscules. Leur taille et poids varie beaucoup selon l'espèce, les plus petites ne mesurant que de 1 à 5 millimètres (Bulbophyllum minutissimum en Australie, qui ne pèse probablement pas plus d'un gramme ou deux alors que la plus grosse orchidée connue (Grammatophyllum speciosum) est une épiphyte qui peut peser plus d'une tonne et développer des tige d'environ 3 mètres de long 1. Selon les auteurs, le nombre d'espèces botaniques dans cette famille varie de 25 à 30000. Ces chiffres en font l'une des plus importantes familles de plantes à fleurs, qui a pratiquement colonisé tous les milieux, à l'exception des déserts et des cours d'eau (Wikipédia, l'encyclopédie libre). 
 
ÉTUDE & EMPLOI 
 
L'étude de la morphologie particulière des fleurs d'orchidées, des relations que ces plantes entretiennent avec les insectes, a d'ailleurs nourri au XIXe siècle les réflexions de Charles Darwin et lui a, en partie, permis d'établir son modèle théorique de l'évolution. 
 
Culture et commercialisation 
Majoritairement d'origine tropicale, ces plantes ont fait l'objet, de la part de riches amateurs, à l'époque de l'expansion des empires coloniaux européens, d'un engouement particulier. Depuis, une meilleure connaissance de leur écologie, de la symbiose qui les unit à certains champignons spécifiques (du genre Rhizoctonia notamment) au cours du développement des embryons, la mise au point de milieux de cultures adaptés, stériles, ainsi que la création d'hybrides horticoles moins fragiles, ont démocratisé leur culture. La très grande variabilité génétique des orchidées, source de la richesse naturelle en espèces de ce taxon, la prête d'ailleurs à une hybridation artificielle: plus de cent mille hybrides horticoles ont été créés depuis la mise au point des méthodes de culture. 
 
Alimentation 
Peu d'orchidées sont utilisées dans l'alimentation. On relève toutefois le genre Vanilla, dont la gousse est la vanille. La vanille est cultivée dans les régions tropicales, et son besoin en ombre rend possible son exploitation en agroforesterie. 
Le Faham (Jumellea fragrans) entre dans la confection du rhum arrangé, lui procurant son goût caramélisé. La cueillette se déroule dans la nature, sur les sites de production, et engendre une raréfication progressive de la plante. 
Les orchidées des régions tempérées et méditerranéennes, aux tubercules très suggestifs, ont inspiré aux adeptes de la théorie des signatures un éventuel aphrodisiaque: on sait aujourd'hui qu'il n'en est rien. Mais dans les régions du Maghreb, ces orchidées sont encore déterrées pour préparer le très populaire salep. En Turquie notamment, 36 espèces parmi 10 genres sont en conséquence menacées d'extinction, et on estime à 42 le nombre d'espèces ayant déjà disparu au cours de la dernière décennie. 
 
Caractéristiques 
Disposition des pièces florales chez les orchidées. Pétales (P), sépales (S) et labelle (L). 
 
 
Fleur d'Orchidée (Delforge, 2005) 
 
La croissance des orchidées est sympodiale, le rhizome émettant des pousses dans plusieurs directions, ou monopodiale, avec une seule pousse. 
Beaucoup d'orchidées tropicales sont épiphytes, et adaptées à l'ombre régnant dans la forêt tropicale. Elles présentent des tiges épaissies à leur base en pseudobulbes, avec des racines souvent pourvues d'un vélamen, voile de radicelles devant capter l'humidité atmosphérique. 
Epiphytes ou terrestres, les orchidées sont adaptées à des milieux difficiles, que bien souvent la symbiose avec des champignons permet d'exploiter. Cette spécificité leur permet de coloniser des milieux relativement peu occupés par d'autres espèces. Plantes se reproduisant par pollinisation entomophile, une grande partie d'entre elles montrent des relations de dépendance étroite avec des insectes pollinisateurs spécifiques, allant jusqu'à des stratégies de leurres visuels, olfactifs et sexuels. 
Ces relations spécialisées en font des espèces particulièrement menacées en cas de perturbations brutales de leurs conditions environnementales. 
Les semences des orchidées sont de très petite taille, et sont produites en très grand nombre: de cette façon elles peuvent être facilement transportées par les vents. En fait, leurs semences sont si petites qu'elles ne possèdent pas les réserves nutritives suffisantes pour engendrer la germination. Des sucres fournis par un champignon symbiotique permettent au germe de se développer en protocorme puis en plantule. 
 
 
L'ORCHIDEE DANS L'HISTOIRE 
 
La relation étroite qui lie ces étonnantes plantes à fleurs à leurs insectes pollinisateurs dure depuis au moins quinze à vingt millions d'années. 
IL y a quinze et peut-être vingt millions d'années, les abeilles butinaient déjà les fleurs d'orchidées ! Une équipe de chercheurs américains, brésiliens et hollandais publie, en effet, dans la revue Nature datée de ce jour, de saisissantes photos d'une abeille fossilisée dans de l'ambre, portant sur son dos un amas de pollen prélevé sur une espèce d'orchidée jusqu'alors inconnue des botanistes, Meliorchis caribea. 
La découverte de ce spécimen exceptionnel, dans une mine située à l'est de la ville de Santiago, en République dominicaine, dans des gisements de lignite datant du Miocène (entre 15 et 20 millions d'années), est intéressante à double titre. Tout d'abord, et bien qu'il s'agisse de la famille de plantes à fleurs la plus représentée sur Terre, avec près de 20 000 espèces recensées, c'est la première fois que des paléontologues réussissent à mettre la main sur un fossile d'orchidée dont l'identité est attestée sans ambiguïté. D'autres fossiles présumés ont bien été exhumés par le passé, mais tous étaient plus ou moins sujets à caution. Ensuite, l'observation d'une interaction aussi ancienne entre une plante et son pollinisateur est un fait sans précédent. Elle montre que la coévolution entre ces deux groupes d'organismes vivants, eux-mêmes très évolués, est un phénomène très ancien et encore énigmatique. « Ce qui me plaît dans ce travail, c'est de voir que cette nouvelle espèce d'orchidée a été identifiée à partir de l'étude morphologique de ses grains de pollen et de leur position sur l'abeille », souligne Marc Pignal, botaniste au Muséum national d'histoire naturelle, à Paris. 
Les orchidées sont en effet les seules plantes dont les grains de pollen sont réunis en deux petits paquets, appelés pollinies, qui vont se coller sur le dos du premier insecte venu se gorger de nectar. Ce dernier, en allant visiter une autre fleur, sera délesté d'une partie de son chargement, permettant ainsi la fécondation. Les modalités de l'échange varient bien sûr d'une orchidée à l'autre, chaque fleur étant visitée par un type d'insecte bien particulier. Dans le cas présent, l'abeille piégée dans l'ambre fossile est une ouvrière d'une espèce éteinte, Proplebeia dominicana, qui avait la particularité de ne pas posséder de dard. 
Un boom spectaculaire. 
L'équipe dirigée par Santiago Ramirez, de l'université Harvard (États-Unis), a montré que les grains de pollen retrouvés sur le spécimen avaient des caractéristiques (taille, forme, ornementation) semblables à celles d'une sous-tribu d'orchidées, les goodyerinae, dont M. caribea faisait donc partie. 
Mais la position des pollinies sur le dos de l'abeille fossilisée est atypique. « Chez les goodyerinae actuelles, les pollinies adhèrent aux mandibules de l'insecte », note les auteurs qui en concluent que la fleur de M. caribea était probablement « en forme de gosier » de façon à permettre à « la partie antérieure du corps de l'abeille de pénétrer entièrement à l'intérieur de la fleur. » 
La datation précise de leur nouvelle orchidée a également permis aux auteurs de revisiter l'histoire évolutive de cette illustre famille de plantes, insuffisamment connue du fait de l'absence de fossiles. 
D'après leurs calculs, le « plus récent ancêtre commun » des orchidées actuelles vivait au Crétacé supérieur entre -84 et -76 millions d'années. En outre, la famille des orchidées aurait connu un boom spectaculaire, avec l'apparition d'un grand nombre de nouvelles lignées peu de temps après l'extinction de masse survenue à la limite du Crétacé-Tertiaire, il y a 65 millions d'années au cours de laquelle les dinosaures et un très grand nombre d'espèces vivantes ont été définitivement rayés de la carte. Autant de résultats qui plaident pour une origine ancienne des orchidées, mais qui demandent à être confirmés par la découverte... de nouveaux fossiles (http://orchidees-alsace.hautetfort.com/l-orchidee-dans-l-histoire.html). 
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LA MYCORHIZE 
par Marc-André SELOSSE 
(http://orchidees-alsace.hautetfort.com/la-mycorhize.html) 
 
Quelle que soit la méthode, la fleur fécondée va donner des fruits qui sont des capsules et chaque capsule contient de plusieurs centaines de milliers à plusieurs millions de graines, c’est dire si elles sont petites et facilement emportées par le vent. Petites, mais généralement pas viables, car elles ne contiennent pas d’embryon. Et c’est là, avant même la naissance de la plante, que commence la relation intime du champignon et de l’orchidée. 
Les quelques schémas techniques que nous présenterons vont aider à mieux suivre, je l’espère, les explications sommaires, mais nécessaires. Ces icônes sont extraites de la « Bible » en la matière, c’est-à-dire du remarquable ouvrage édité par la Société Française d’Orchidophilie, le plus complet sans doute bien que certains botanistes lui reprochent d’être à l’avant-garde de ce qu’ils appellent dans leur jargon la « machine à laver la vaisselle », c’est-à-dire l’introduction d’une édition à l’autre de changements de noms parfois discutables (en tous cas discutés !) et des balancements d’espèces d’un genre à un autre pour des raisons pas toujours évidentes pour le commun des mortels : migraine garantie… Mais nous ne prendrons pas partie dans ces discussions de bénédictins. 
 
L’idylle orageuse de la plante et du champignon commence par la graine, ce qui fait l’originalité (une de plus) des orchidées. Cette graine est microscopique, légère, voyageuse mais rachitique : elle ne contient pas d’embryon, nous l’avons dit, et seulement un simple amas de cellules indifférenciées, et elle est presque dépourvue de réserves. Seule la colonisation par un champignon permet la germination de la graine en apportant les nutriments nécessaires. Cette découverte fondamentale date de la fin du 19e siècle (donc les plus vieux d’entre vous devraient le savoir) et elle est due à un chercheur français, Noël Bernard, qui a mis en évidence le mycélium dans les graines en germination ; il a même pu isoler le champignon et le réinoculer.  
 
Les fragiles embryons des orchidées, mal protégés par un tégument ridicule, nus et sans défense, sont la proie de microorganismes de toutes sortes. Leurs survivants, extrêmement rares, sont ceux qui ont la chance de rencontrer un champignon vis-à-vis duquel ils sont spécifiquement immunisés, et ils tentent alors de limiter l’envahissement en phagocytant le mycélium. Les recherches, qui progressent à grands pas avec les moyens de la science moderne (ADN, chimie moléculaire), nous ont permis de constater comment le champignon pénètre dans la graine et comment il va se comporter. Je vais utiliser là un vocabulaire anthropocentrique pour mieux me faire comprendre. Il ne s’agit pas de n’importe quel champignon, mais de l’élu, du partenaire officiel de cette orchidée-là depuis des millénaires. Ayant reconnu sa graine favorite, indifférent aux autres, il pénètre par le suspenseur qui attache la graine à la capsule et atteint les cellules indifférenciées. S’il est rejeté, la graine n’a pas compris la gravité de la situation, elle est morte ; s’il se comporte en parasite trop exigeant, c’est lui qui n’a pas compris, il détruit la graine, elle est morte et il ne tire aucun profit ; enfin, dans le cas le plus favorable, il se produit un accord tacite, un gentleman’s agreement, (on appelle ça la mycotrophie) et le champignon colonise la graine progressivement en formant des pelotons intracellulaires. 
Il stimule la croissance et l’embryon se développe alors, formant un massif cellulaire plus gros, hérissé de poils, appelé protocorme dans lequel le champignon continue à développer ses pelotons. 
 
Le protocorme devient progressivement (il faut parfois plusieurs années) une plantule dont les radicules sont infectées et le champignon se retrouve progressivement dans les organes souterrains de la plante adulte. On se demande avec angoisse ce que va devenir ce champignon, car nous autres mycologues, le plus souvent, nous nous moquons bien des orchidées (on ne va tout de même pas se mettre à faire de la botanique, maintenant que les champignons ont acquis leur propre règne !). 
Eh bien, nous allons arriver au deuxième événement dans la vie de l’orchidée devenue adulte, un deuxième mariage entre la plante et un champignon : la symbiose mycorhizienne (comme chacun sait, la symbiose est une association étroite de deux organismes, mutuellement bénéfique, voire même comme ici indispensable à la vie ; et les mycorhizes ce sont les filaments issus du champignon qui favorisent cette symbiose). 
 
L’orchidée peut faire confiance au champignon qui a fait germer sa graine ou le rejeter et s’associer avec un autre champignon (ce qui n’est pas très correct, mais n’étant pas orchidée – ça se verrait – nous n’avons pas le droit de juger). Selon l’importance jouée par le champignon, l’orchidée sera chlorophyllienne, comme la plupart des plantes, ou plus rarement non chlorophyllienne, comme par exemple Neotia nidus-avis, la Néotie nid d’oiseau. 
 
En tous cas, cette symbiose entre une orchidée et un champignon va beaucoup plus loin que celle qui lie un champignon à un arbre particulier, comme on connaît beaucoup d’exemples (le sanguin, Lactarius deliciosus et le pin, par exemple). C’est une triple association qui unit l’orchidée à un arbre par l’intermédiaire du champignon, lequel va chercher de l’eau, des sels minéraux, et surtout du carbone chez l’arbre et les troque à l’orchidée contre des éléments nutritifs comme le sucre. Comme l’a si bien dit Bernard Boullard dans son excellent ouvrage Guerre et paix dans le Règne Végétal, « il y a un volé (l’arbre), un voleur (le champignon) et un receleur (l’orchidée) ». Si la symbiose habituelle entre le champignon et l’arbre de nos forêts est ectomycorhizienne (c’est-à-dire que le champignon reste à la surface des racines et les couvre d’une sorte de manchon), la relation avec la chair de l’orchidée est le plus souvent envahissante, car le champignon pénètre par effraction dans la racine (on dit qu’il est endomycorhizien). 
Il forme des pelotons intraracinaires, comme il l’a fait (lui ou son confrère) dans la graine et dans le protocorme, et il envahit ensuite les organes souterrains, comme les tubercules ou les rhizomes, jamais les parties aériennes de la plante. Au niveau des racines, il est souvent ectomycorhizien. D’ailleurs, si le champignon pousse le flirt un peu trop loin, l’ingrate orchidée a les moyens de se défendre, en produisant des antibiotiques toxiques comme les phytoalexines et même des substances fongicides, par exemple l’orchinol chez les Anacamptis ou encore l’hircinol chez Himantoglossum hircinum, l’orchis bouc. Plus dramatique encore, j’allais dire scandaleux, la plupart des orchidées sont capables de digérer les champignons, quand leur présence n’est plus utile. On appelle cet acte barbare la tolypophagie, la digestion des pelotons, ce qui permet à l’orchidée, véritable mante religieuse, de s’approprier les éléments nutritifs de son compagnon de route. C’est compliqué à expliquer, parfois même à comprendre, mais aujourd’hui on peut considérer, selon le point de vue auquel on se place, que la symbiose est un leurre, un armistice passager, et que le champignon est parasite de l’orchidée, ou que l’orchidée est parasite du champignon, ou mieux encore comme l’a si bien dit Lewis que l’association est un « vrai champ de bataille » qui profite à l’un ou à l’autre selon la disponibilité des nutriments.  
Ces noces barbares, c’est encore un monde sans pitié, mais on ne prendra pas parti, on retiendra surtout les incroyables relations des orchidées, d’une part avec le monde animal (ces insectes qui fécondent leurs fleurs), le monde fongique avec ces champignons qui les colonisent ou les assistent, et le monde végétal, ces arbres avec lesquels elles échangent des nutriments par l’intermédiaire des champignons. Notons en passant, et c’est une connaissance relativement récente, qu’il existe une autre symbiose capitale entre une plante et un champignon ; elle concerne les poacées ou graminées. Mais ce n’est pas notre affaire aujourd’hui… 
 
Une question se pose maintenant : qui sont ces champignons orchidophiles? 
On sait que l’identification des mycéliums est une tâche difficile, quasiment impossible ; était, plutôt, car maintenant cette tâche est rendue plus facile par l’utilisation de l’ADN. Les mycologues de grand-papa, ou les mycologues un peu périmés, comme nous, pouvaient se fonder, pour différencier les champignons dits supérieurs, les Ascomycètes des Basidiomycètes, sur une étape de la reproduction sexuée, la méiose ou réduction chromatique (c’est-à-dire le processus de dédoublement du nombre de chromosomes, lequel avait été doublé lors de la fécondation). Quant aux champignons dépourvus de phase sexuée, on les regroupait au sein des Deutéromycètes ou champignons imparfaits. On avait même créé au sein des Deutéromycètes des genres et des espèces qu’on reliait plus ou moins bien, quand on le pouvait, aux champignons sexués. 
Quand Noël Bernard avait isolé et cultivé le champignon associé à l’orchidée sur laquelle il travaillait (c’était la Néotie nid d’oiseau, dont nous avons déjà parlé), il l’avait rapporté au genre Rhizoctonia, et par la suite on a attribué un peu trop vite le nom de Rhizoctonia à tous les champignons symbiotiques des orchidées (passons sous silence le nom générique d’Orchidomyces, utilisé par certains auteurs, et qui n’avait aucune signification systématique). 
 
Ces dernières années, grâce à des études basées sur l’ADN et la biologie moléculaire, le genre Rhizoctonia a éclaté et les chercheurs ont établi de nombreuses correspondances avec des Basidiomycètes et des Ascomycètes, ce qui nous permet d’affirmer que beaucoup d’ouvrages, même récents, qui se contentent de mettre en cause des Rhizoctonia sans plus de précisions sont singulièrement dépassés, car Rhizoctonia est un genre polyphylétique d’hétérobasidiomycètes, je le dis comme je le pense, dont certaines espèces appartiennent à la famille des Sébacinacées. Là où l’affaire se complique, c’est que les séquençages ADN, par exemple ceux étudiés et exposés lors des Journées Jean Sauvageon (Rencontres de Phytopathologie/Mycologie) montrent qu’une orchidée peut avoir plusieurs partenaires, et que ces hétérobasidiomycètes de la famille des Sébacinacées (Sebacina, Rhizoctonia) sont des ectomycorhiziens ignorés, ce qui suggère selon les auteurs, l’importance, voire même la plésiomorphie, de l’état mycorhizien dans l’évolution des basidiomycètes. On n’en dira pas plus !  
Il n’est pas possible, ici, de rentrer dans les détails, mais je vous propose un pari et une statistique : demandez aux mycologues, même de haut rang, comme nous en voyons régulièrement lors des Journées d’Entrevaux, combien connaissent les champignons symbiotiques des orchidées, je parle des macromycètes, pas des Rhizoctonia. Vous ne serez pas déçus…Quels champignons parmi les Basiodiomycètes ? Eh bien, des gros, des bien connus, qui n’ont rien à voir avec les micromycètes longtemps incriminés : des armillaires, champignons féroces, capables de tout (l’ennemi N°1 des forestiers), mais aussi des russules, des cortinaires, des inocybes, et même des théléphores – on aura tout vu ! et bien d’autres encore. Et chez les Ascomycètes ? Beaucoup d’Hélotiales, et des Pézizales, et même les truffes (la relation symbiotique chêne-truffe-orchidée a été récemment prouvée).  
Evidemment, quand on découvre ça, on en reste abasourdi… Et plus étonnant encore, là je vous livre un secret dont certains feront certainement un mauvais usage, les ramasseurs de morilles savent bien, eux, que la floraison d’orchidées printanières annonce la sortie prochaine de morilles même s’ils ignorent, comme la plupart d’entre nous, que la plante et le champignon vivent en symbiose. D’ailleurs, comme le rappelait notre distinguée administrateur (administratrice ?) Monique Correnson, bas-alpine de longue lignée, en Provence on appelle ces orchidées « fleurs de morilles ». 
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(c) Khellaf REBBAS - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 9.08.2014
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